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![]() Prats-de-Mollo (1870-1963) Un remède contre le capitalisme Aux confins des Pyrénées-Orientales, à l’extrémité de la vallée du Tech, la commune de Prats-de-Mollo a accueilli au début du XXe siècle un personnage d’envergure nationale. Pharmacien, journaliste, promoteur de la Société des Touristes du Haut-Vallespir, anarchiste puis socialiste, Achille Daudé a surtout été militant coopérateur. Secrétaire de la Fédération nationale des Coopératives de consommation fondée en 1912, il est élu en 1918 au Conseil Supérieur de la Coopération. Achille Daudé dit Daudé-Bancel. Elu en 1913 Secrétaire général de la Fédération Nationale des Coopératives de consommation. Il est chargé de la presse. Pharmacien à Prats-de-Mollo Né en 1870 à Bancel dans le Gard, sur la commune de Carnas, Achille Daudé est le fils d’un artisan cordonnier, franc-maçon militant. Après des études pharmaceutiques entreprises à Montpellier en 1890, il travaille à la pharmacie du Dr. Pezet, maire de Montpellier, sous l’enseigne évocatrice « A la pharmacie républicaine ». Après avoir effectué divers remplacements, A. Daudé acquiert au tournant du XXe siècle la pharmacie de Prats-de-Mollo, dans les Pyrénées-Orientales. Egalement journaliste, il collabore régulièrement à La Dépêche de Toulouse. De son action pharmaceutique, on connaît peu de choses. Seule une réclame de 1901 évoque les aspects thérapeutiques de son activité : Daudé prépare pour ses patients des « cigares médicinaux » dont l’usage s’est répandu depuis une vingtaine d’années. Ces préparations sont constituées de plantes naturelles et de feuilles superposées, roulées sous une forme analogue à celle de la Régie des tabacs. Ces cigares, nécessitant un porte-cigare et dont on peut parfois ne tirer que quelques bouffées par jour, sont surtout utilisés dans les maladies des voies respiratoires, les traitements du larynx, de la bouche et du nez. Cliché du Bulletin Catalan pour la Société La Société des Touristes du Haut-Vallespir Conscient des vertus botaniques et climatiques du territoire local, Daudé devient, par extension, promoteur de la Société des Touristes du Haut-Vallespir, constituée à Prats-de-Mollo en 1901. Forte de 44 membres, la société est largement ouverte sur l’extérieur. Elle est présidée par Henri Goguel, maître de conférences en minéralogie à la faculté des sciences de Bordeaux et administrateur délégué de la Société Pyrénéenne de Sanatoria et Hôtelleries de Montagne. La vice-présidence est assurée par le docteur Guisset, futur maire radical-socialiste de Prats-de-Mollo, et le secrétariat par E. de Careffe, ex-préparateur en agronomie à la faculté des sciences de Bordeaux. Domicilié à Prats-de-Mollo, celui-ci deviendra président du futur syndicat d’initiative de la commune. De Montpellier à Bordeaux, rassemblant des enseignants, chefs d’entreprises et hôteliers locaux, la société a en définitive pour but « de développer le goût des excursions, d’en faciliter la pratique, et de vulgariser les connaissances multiples qu’elles peuvent apporter ». Trésorier de l’association, Daudé participe également au Bulletin Catalan, organe de la société dont le premier numéro est édité à Bordeaux en 1901. Ce bulletin, informatif et pédagogique, se propose de signaler des travaux intéressant la Catalogne, ou qui seront publiés par ses collaborateurs. Ainsi y paraît la mention de l’ouvrage rédigé par Achille Daudé, publié à Paris en 1901 et intitulé Le Coopératisme. Ce fort volume de 250 pages et 25 figures apparaît alors comme « le traité le plus complet qui ait paru sur la matière en langue française ». 22ème volume de la collection des Livres d’or de la Science, son succès est tel qu’il est réédité trois semaines après sa parution. Militant du mouvement coopérateur De fait, Achille Daudé est déjà un militant du mouvement social et en particulier du mouvement coopérateur. Initialement adhérent au groupe anarchiste « L’homme libre » de Montpellier, son existence a surtout été marquée par sa rencontre avec Charles Gide (1847-1932), chef de file d’une école de pensée dite l’Ecole de Nîmes. Ce courant de pensée nourrit la conviction que, surtout, les coopératives de consommation sont porteuses des possibilités d’amélioration immédiate du sort des travailleurs. De cette rencontre naîtra l’action d’Achille Daudé en faveur du développement du coopératisme en France. Selon diverses biographies, Daudé reste à Prats-de-Mollo durant trois ans : « il vendra même sa pharmacie pour aider à la création de coopératives de consommation » indique une notice. De fait, en 1902, C. Gide préside l’organisation dite Union coopérative des Sociétés françaises de consommation ; A. Daudé en devient secrétaire en 1903. Une décennie plus tard, en 1912, a lieu la fusion entre l’Union de Gide et Daudé, de tendance relativement modérée, et la Confédération des Coopératives socialistes et ouvrières, plus syndicale et politique. Ainsi naît la Fédération nationale des Coopératives de consommation, qui tient son premier congrès à Reims en 1913. Réalisant l’unité coopérative, la Fédération nationale, siégeant à Paris, forme désormais l’organe central de la coopération française. Elle réunit alors 962 sociétés et compte environ 350 000 membres. Achille Daudé y est élu l’un des deux secrétaires généraux. Après la première Guerre mondiale, en 1918, il est élu membre du Conseil Supérieur de la Coopération. Réclame pharmaceutique faite par A. Daudé (1901). Les coopératives dans les Pyrénées-Orientales Dans leur ensemble, les Pyrénées-Orientales font un accueil favorable aux coopératives de consommation et de production, instruments d’émancipation des travailleurs. De fait, le département se distingue d’abord par l’essor des coopératives de production. Dans la vallée du Tech, ces premières coopératives apparaissent dans l’industrie bouchonnière dès les années 1880, suivies après la première Guerre, par l’industrie sandalière du Vallespir. C’est dans cette vallée, certainement non exempte de son influence, que dans l’intervalle, s’est établi Achille Daudé au tournant de 1900. A terme en effet, l’essor quantitatif des coopératives de consommation est à son tour patent : en 1913, la Fédération nationale compte 20 coopératives issues de l’Aude, des Pyrénées-Orientales et de l’Ariège. Après guerre, en 1923, les seules Pyrénées-Orientales comptent, selon un annuaire spécialisé, 41 coopératives de consommation et 14 coopératives agricoles. Achille Daudé pour sa part demeure actif dans l’économie sociale jusqu’au terme de son existence : nommé pharmacien à la pharmacie mutualiste de Sotteville-les-Rouen, il décède à Rouen en 1963. Quarante ans plus tôt, la « Bibliothèque du Bon Coopérateur » recommandait déjà ses principaux ouvrages : Le coopératisme devant les écoles sociales (1897), Le coopératisme (1901) et La concentration des Forces Coopératives,ouvrage collectif. En réalité, il avait mis en œuvre un idéal : « substituer au régime compétitif et capitaliste, un régime où la production sera organisée en vue de la collectivité des consommateurs et non en vue du profit ». Il s’agit du premier principe de la Charte de la coopération, en 1913. E. PRACA Article paru dans Bibliographie sélective
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